Commissariat central, 00h 35.

Encore une nuit de garde pour l'inspecteur David Garnier. Affecté à ce poste depuis seulement quelques mois, il était policier depuis beaucoup plus longtemps. Parfois, il avait même l'impression que cela faisait des décennies. Il avait choisi les affaires criminelles par goût des romans policiers, qu'il lisait depuis son enfance. Plus tard, il avait suivi des études en criminologie et obtenu une maîtrise dans ce domaine. Pressé à l'idée de devenir inspecteur et d'être sur le terrain, il avait arrêté son doctorat avant de terminer sa thèse. Envisageant de reprendre ses études plus tard, il repoussait l'échéance sans cesse pour ne pas passer ses journées derrière un bureau. «Quand je me ferai vieux», se disait-il. 
Plusieurs fois récompensé pour son excellent travail, il avait très vite déchanté depuis qu'il avait effectué une mission d'infiltration qui avait coûté la vie à son coéquipier.
Profondément affecté, il était depuis quelques semaines sur la touche, après une évaluation psychologique assez négative, et ne s'occupait plus que de dossiers simples en attendant sa réévaluation dans six semaines.
À vingt-neuf ans, il était, comme on avait coutume de le dire, au «placard». Et c'était loin de lui plaire... Mais depuis quelques jours, il avait décidé de faire profil bas, afin d'être réhabilité le plus vite possible sur de «vraies» enquêtes. Aussi, lorsque son patron le lui demanda, il décida de se charger de cette enquête de routine.
Retrouver l'identité de quelqu'un n'était pas bien compliqué, et en plus, ça lui permettrait de bouger un peu et d'éviter de s'endormir devant les dossiers en attente de classement...
Lorsqu'il arriva à l'hôpital, il constata par lui-même l'effervescence due au carambolage dont s'occupait d'ailleurs la brigade routière. À l'accueil, une infirmière lui expliqua où se trouvait la chambre de la patiente et lui rappela qu'il ne fallait pas trop la déranger. Il lui fit un signe affirmatif et se dirigea vers la chambre. À peine ouvrit-il la porte qu'il se retrouva nez à nez avec la malade qui, dessanglée, tentait une nouvelle fois de partir.
«Je ne crois pas que vous devriez faire ça, lui dit-il en la prenant par le bras pour la ramener vers son lit, sauf si vous avez quelque chose à vous reprocher...»
Il lui sourit, mais elle ne lui répondit pas et se rallongea nonchalamment. Lorsqu'il croisa son regard, il ressentit comme un petit choc électrique au niveau de ses tempes, passa rapidement ses mains sur celles-ci et reprit aussitôt.