Masse critique : Travers de routes de Damien Personnaz

Une belle découverte qui remue la tête et les tripes...

L'humanitaire n'a jamais été un long fleuve tranquille. Connaissant un peu le sujet, je m'y attendais, mais je ne pensais pas que la lecture de Travers de routes de Damien Personnaz, m'entraînerait autant. L'auteur prévient pourtant dès la 4ème de couverture : « voyager, c'est voir le monde tel qu'il est et non pas comme on voudrait qu'il soit. » Et là, il tape en plein dans le mille.

À travers des fragments d'anecdotes liés à ces différents voyages, Damien Personnaz dresse un état des lieux du monde humanitaire sans tabou, sans filtre. On pourrait presque dire "âmes sensibles s'abstenir", mais en fait non, il ne faut surtout pas, il faut le lire pour que justement on se rende compte de ce que c'est, de ce qu'il se passe vraiment là-bas. Pour se rendre compte que le monde ne se résume pas à quelques images que l'on zappe à la télévision en se plaignant dans notre petit confort quotidien. L'auteur, nous emmène avec lui dans les endroits les plus difficiles d'accès, les plus dangereux aussi sans doute. Et c'est du cash, mais du cash d'autant plus dérangeant qu'il est entraînant : on suffoque avec lui, au Libéria, dans sa chambre à la fenêtre confinée par un matelas portant l'inscription Médecin sans frontière. On a des sueurs froides en s'imaginant qu'il dort dans le même hôtel où le film « Hôtel Rwanda » a été tourné, film retraçant le génocide éclair (800 000 Rwandais tués en 3 mois). On se dit... il y était ! Et on a du coup, les images qui vont avec ce qu'il dit. Glaçant. 

Ce qui rend le livre d'autant plus touchant est que l'auteur ne se contente pas de raconter ce qu'il voit sous forme de carnet de voyage, il analyse, conclue parfois. Il rend son histoire humaine : oui, il est toujours hanté par la femme à la robe rouge. Non, il n'a pas revu telle ou telle personne. Parce que oui, il a fait des erreurs, peut-être, mais de très belles choses également. Et c'est tout à son honneur. Il n'est pas amer, au contraire, il est réaliste, serein, parfois cynique, mais cela ne fait pas de mal. On lit, on plonge, on se pose des questions, on voyage avec lui. On découvre un univers que l'on ne connait pas très bien, une autre facette. Ce livre fait partie d'une collection chez l'éditeur : Traces. Et je pense que lorsqu'on le referme, il en laisse, des traces, sur nous. Pas une envie de faire de l'humanitaire, il ne faut pas aller jusque-là, mais une envie de voir les choses autrement. Et c'est tant mieux.

Merci à Masse critique de Babelio, aux éditions de la Rémanence et surtout, à Damien Personnaz.